Portrait de Neville Tranter à lʼoccasion de la 14 éme édition des Champs de la Marionnette à La Norville.
par Nicole Charpentier (metteure en scène de Daru-Thémpô)

« Incontestablement, Neville Tranter, marionnettiste international australien vivant aux Pays-Bas, est un show- man, un performer. Avec Punch et Judy, et Mathilde, il nous livre deux oeuvres dont le jeu excède la réalité de la nature humaine tout en nous confrontons à une certaine vérité des situations… La maison de retraite pour personnes âgées en est une, lʼaventure en Afghanistan , une autre…
Que fait Neville Tranter?
Il est seul en scène, face public, direct, frontal.
Axe et médium, vecteur dʼénergie, il joue avec ses marionnettes, créatures portraitisées (sans corps), caricaturales, dents perlées, yeux strassés.
Lui seul distribue les identités, la sienne, car il est acteur, – il a un rôle – et celle de ses effigies (gueule ouverte jusquʼà la luette) quʼil brandit et manipule.

De là, sʼinstaure le dialogue, atone et spasmé, du rien à lʼextrême en un quart de temps. Le Temps a donc changé, de la dépression à lʼhystérie, il enfile ses monstres, déroule le sens de lʼhistoire, le destin de ses personnages.
Pas de narration méthodique, non ! Notre système nerveux est ultra-sollicité. Il y a des cris, des grincements de dents, des empoignades. On frémit. Cʼest violent. On pense au peintre Francis Bacon.
Son tour de force sʼintensifie quand il nous fait sentir quʼil joue son rôle de marionnettiste réprimandé par ses créatures. Normal, il manipule des monstres !
Puis vient le temps de relâchement quand il les remise sur un portant. On est alors hors ring. Cʼest le temps du non-jeu, hautement affirmé, scénographié.
Enfin, il sourit. Il prend de la distance. Le comique intervient, reléguant le tragique à plus tard.
On sʼaperçoit enfin que Neville Tranter, artiste apaisé, confiant, aimé de son public, manifeste vraisemblablement une certaine joie à être là, sur scène. Voilà, je suis Neville, vous mʼaimez, moi aussi, et je mʼamuse à vous faire peur. Il sourit donc. Nʼayez crainte. Je joue. Je “performe”. Ca se voit. Ca transpire. Ce nʼest pas dangereux finalement. Je peux recommencer. Non pas tout de suite. Une autre fois. Merci. Merci. Main sur le coeur… A bientôt.

Nicole Charpentier
pour le blog de Daru-Thémpô > polemarionnette.com

Le 12 novembre 2012